Nous sommes appelés à la guérison, au pardon, à la réconciliation
Nous, le Corps du Christ, sommes appelés à vivre dans l’amitié et l’harmonie avec tous les peuples. Nous sommes frères et sœurs de notre unique Dieu Créateur. À nous tous, Dieu donne tout. Dieu crée et préserve la merveilleuse diversité des peuples, des cultures, des races et des croyances.
Quelle tristesse lorsque notre bienheureuse diversité devient source de division, de menace et d’intolérance! De plus, à mesure que nous affrontons les difficultés et les blessures de la vie, notre douleur peut alimenter notre peur et notre colère, ruinant les occasions de pardon et de guérison, et bloquant le chemin qui nous permettrait de les atteindre. À moins que nous assumions la responsabilité de notre guérison, il sera difficile d’aller de l’avant.
Pour répondre à cette situation humaine commune, les peuples autochtones cultivent plusieurs traditions de quête de la guérison spirituelle. Par exemple, un enseignement courant est de chercher la guérison en allant « sur la terre ». La terre – désert ou forêt – est le lieu où nous rencontrons l’Amour de notre Créateur, qui nous invite à laisser nos soucis derrière nous et à rencontrer le Dieu et le Créateur de la Paix, de la Lumière et de l’Espérance. Le « cercle de partage » est une autre façon par laquelle une personne qui a été blessée peut être accueillie et entendue par les autres membres du cercle, afin de dépasser d’une situation de rupture et de rétribution à un chemin de réparation et de paix.
Saint Jean-Paul II nous rappelle qu’« il n’y a pas de paix sans justice, il n’y a pas de justice sans pardon ». Et il insiste : « je ne me lasserai pas de répéter cet avertissement à ceux qui, pour un motif ou un autre, nourrissent en eux la haine, des désirs de vengeance, des instincts destructeurs[1] ».
Avec l’âge, il devient plus difficile de pardonner. Un prêtre missionnaire âgé a un jour réfléchi à un choix important que nous faisons tous en vieillissant : « On peut être un vieil homme grincheux ou un vieux fou sage; il s’agit de faire le bon choix. »
La découverte des 215 tombes non marquées par la Première nation Tk’emlúps te Secwépemc, de même que la découverte de tombes dans d’autres anciens pensionnats, ont suscité beaucoup de chagrin et d’angoisse à savoir que des catholiques figuraient parmi les dirigeants et dirigeantes des pensionnats établis par le gouvernement fédéral, qui ont fonctionné dans ce pays à partir des années 1870 jusqu’à la fin des années 1990.
Le pape François nous rappelle que le « pardon » n’est pas temporaire ou superficiel. Comme il le déclare dans Fratelli Tutti,
Le pardon n’implique pas l’oubli… Le pardon libre et sincère est une grandeur qui reflète l’immensité du pardon divin… Ceux qui pardonnent en vérité n’oublient pas, mais renoncent à être possédés par cette même force destructrice dont ils ont été victimes. Ils brisent le cercle vicieux, ralentissent les progrès des forces de destruction. Ils décident de ne pas répandre… dans la société l’énergie de la vengeance qui, tôt ou tard, finit par retomber une fois de plus sur eux-mêmes[2].
Il nous est souvent très difficile de trouver et de voir Dieu. En réponse à la question, pourquoi demander où est Dieu?, une Dénée Tlicho a remarqué un jour que nous devrions regarder autour de nous, malgré toute la violence sur la terre, elle continue de nous faire vivre. Notre mère continue de subvenir à nos besoins et nous donne tout.
Selon un aîné déné, le Créateur nous indique le chemin de la guérison. La Terre ne cesse de donner. Nos parents et grands-parents sont des gens qui ont donné leur vie pour nous. Nous avons fait beaucoup d’erreurs. Mais il y a quelqu’un qui a donné Sa vie pour nous. On nous a pardonné nombre de fois par le sang de Jésus Christ. Le privilège de notre humanité comporte la grande responsabilité de respecter et prendre soin de nos frères et sœurs, en particulier de ceux et celles qui confrontent des obstacles, des injustices ou d’autres barrières à leur liberté et à leur bonheur.
L’une de ces barrières consiste en la discrimination et les préjugés fondés sur les différences entre les peuples. La pandémie de la COVID-19 a aggravé cette situation et, à moins de trouver une approche meilleure et plus respectueuse, les esprits et les cœurs des gens continueront de sombrer dans la corruption. Cette meilleure approche commence toujours dans notre propre vie; dans notre esprit et dans notre cœur. Le prophète Ézéchiel nous le dit : « faites-vous un cœur nouveau et un esprit nouveau! » (Ézéchiel 18, 31). Nous ne pouvons travailler à la réconciliation, à la croissance et à la guérison que si nous sommes ouverts à tout cela dans notre propre vie.
En cette année de saint Joseph, peut-être que cet ancien de notre foi – le père de Jésus et l’époux de Marie – peut nous enseigner une caractéristique importante de ce chemin. Comme l’enseigne le pape François :
Joseph laisse de côté ses raisonnements pour faire place à ce qui arrive et, aussi mystérieux que cela puisse paraître à ses yeux, il l’accueille, en assume la responsabilité et se réconcilie avec sa propre histoire. Si nous ne nous réconcilions pas avec notre histoire, nous ne réussirons pas à faire le pas suivant parce que nous resterons toujours otages de nos attentes et des déceptions qui en découlent[3].
Un proverbe inuit dit : « il y a longtemps, dans l’avenir; faites voir notre histoire aux enfants, peut-être cela aidera-t-il à façonner l’avenir ». Prions et travaillons de manière à ce que nos enfants sachent que les personnes qui les ont précédés ont pris au sérieux le problème de l’intolérance et des préjugés – en particulier pendant les périodes d’incertitude et de peur – et qu’elles ont répondu en travaillant pour une culture de sollicitude et de respect. Quel cadeau pouvons-nous laisser à nos jeunes? : un exemple et un souvenir qu’ils pourront emporter dans un avenir inconnu, mais riche d’espérance.
Prions
Ô Dieu, Grand Esprit et Créateur fidèle, nous qui sommes tes enfants reconnaissons humblement
notre parenté avec tous les êtres vivants. Nous te remercions, nous te louons et nous t’adorons.
Nous t’en prions, Grand Mystère, Verbe fait chair – notre maître, notre prophète et notre frère –
ouvre nos cœurs à tous nos frères et sœurs, et fais-nous grandir avec eux en sagesse, en honnêteté, en courage et dans le respect des enseignements sacrés.
Donne-nous la lucidité et l’honnêteté de reconnaître que nous sommes tous frères et sœurs au sein de l’unique famille humaine, créés et préservés par l’unique Créateur. Face aux problèmes, fais que nous ne cédions ni à la peur ni à la colère qui sèment divisions et menaces entre les peuples.
Nous voyons comment Dieu ne cesse de nous donner afin de remédier aux péchés des préjugés et de l’intolérance. Nous voyons en Dieu l’unique Créateur dont la générosité pourvoit constamment à nos besoins en dépit du mal que nous avons fait sur la terre. Nous voyons dans le Fils, Jésus Christ, la Victime innocente qui donne la vie en versant son sang sur la Croix pour tous les peuples. Nous voyons dans l’Esprit Saint le don de Dieu, à l’œuvre dans notre monde aujourd’hui, qui nous inspire le désir et l’espoir d’avoir toutes et tous l’esprit et le cœur même de Dieu!
Que Votre Esprit bénisse et guide également la délégation de dirigeants, de dirigeantes et de jeunes autochtones alors qu’ils se préparent à rendre visite au Saint-Père, le pape François, dans un avenir proche. Que cette visite soit une occasion de grâce et de guérison, et qu’elle rende possible un chemin et un avenir renouvelés.
Dieu Créateur, indique-nous le chemin de la guérison, du pardon et de la réconciliation, et suscite entre nous une fraternité renouvelée. +Amen
[1] XXXVe Journée mondiale de la Paix 2002, Il n’y a pas de paix sans justice, il n’y a pas de justice sans pardon | Jean-Paul II (vatican.va)
[2] Fratelli tutti (3 octobre 2020) | François (vatican.va)
[3] Lettre apostolique Patris Corde du pape François à l’occasion du 150e anniversaire de la déclaration de saint Joseph comme patron de l’Église universelle (8 décembre 2020) | François (vatican.va)