ICCRS, FCCCA, CHARIS, ça vous dit quelque chose ? Probablement pas ! Et pourtant, cela vaut la peine d’en être bien informé, car une nouvelle entité créée par le Pape François vient de voir le jour il y a quelques années de cela, et se propose de vivifier et de stimuler en profondeur la dimension spirituelle et évangélisatrice de toute l’Église catholique. Ai-je réussi à capter votre attention ?
Le 8 juin 2019, le Pape François adressa un discours à de nombreux représentants du Renouveau charismatique réunis à Rome du 6 au 8 juin. Reprenant l’idée que le Pape saint Paul VI avait partagé aux participants du IIIème Congrès International du Renouveau charismatique catholique en 1975, il leur déclara que le Renouveau charismatique est « une chance pour l’Église. »
En effet, saint Paul VI avait affirmé en 1975, que « l’Église et le monde ont besoin plus que jamais que le prodige de la Pentecôte se poursuive dans l’histoire (…) Rien n’est plus nécessaire à un tel monde, de plus en plus sécularisé, que le témoignage de ce « renouveau spirituel », que Nous voyons le Saint-Esprit susciter aujourd’hui dans les régions et les milieux les plus divers. » (Discours du Pape Paul VI aux participants au IIIème Congrès International du Renouveau Charismatique Catholique, Vendredi 19 mai 1975).
Lors de la rencontre qui s’est tenue à Rome le 8 juin 2019, le Pape François remerciait également le ICCRS (Service international du Renouveau charismatique catholique) et la Fraternité catholique pour avoir « tracé la voie » et pour avoir « permis à CHARIS (…) d’être aujourd’hui une réalité. » Mais, quel est le but de cette nouvelle entité appelée CHARIS, et pourquoi le Saint Père François la juge-t-elle essentielle pour la vitalité de l’Église catholique? Voici des extraits d’une entrevue réalisée par le Vatican News avec le P. Awi et M. Jean-Luc Moens en 2018, et qui nous permet de comprendre le but et le rôle de la nouvelle entité :
VN – Le 8 décembre 2018, le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie a érigé un nouveau service pour le courant de grâce qu’est le Renouveau charismatique catholique. Ce service s’appelle CHARIS, acronyme des International Catholic Charismatic Renewal Services. (VN = Vatican News)
Awi – CHARIS est appelé à servir toutes les expressions du courant de grâce qu’est le Renouveau charismatique. Ses statuts entreront en vigueur le 9 juin 2019, Solennité de la Pentecôte. Le même jour, la Fraternité catholique des communautés charismatiques de l’Alliance (encore appelée Fraternité catholique) et l’ICCRS (International Catholic Charismatic Renewal Services) cesseront définitivement leurs activités. Il est important de noter que CHARIS n’est pas le fruit de la fusion de ces deux organismes, mais un tout nouveau service qui inaugure une nouvelle étape dans la vie du Renouveau charismatique catholique international. Je crois qu’après la Pentecôte, la nouveauté se manifestera de plus en plus clairement. Il convient aussi de relever que CHARIS n’est pas un organisme de gouvernement mais un service de communion, selon la volonté expresse du Saint-Père.
VN – Comment est structuré ce nouveau service ?
Awi – CHARIS est placé sous la responsabilité d’un Modérateur, assisté d’un Conseil appelé Service international de communion, composé de 18 personnes provenant du monde entier. Certaines d’entre elles sont l’expression des différents continents tandis que d’autres représentent les différentes réalités du Renouveau charismatique. Pour ce premier mandat, tous les membres ont été nommés par le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie.
Le premier modérateur est Jean-Luc Moens, laïc marié, père de famille, engagé dans le Renouveau charismatique depuis plus de 45 ans. Le père Raniero Cantalamessa, OFM Cap [aujourd’hui cardinal], Prédicateur de la Maison pontificale, en est le premier Assistant ecclésiastique selon le désir du Saint-Père.
Le Pape a fortement voulu que le Saint-Siège crée CHARIS afin que le Renouveau charismatique et toute l’Église sachent que le Renouveau charismatique appartient pleinement à l’Église universelle.
L’un des aspects essentiels que le Saint-Père a voulu mettre en évidence est sans aucun doute l’importance de la communion, c’est-à-dire de l’unité dans la diversité. CHARIS est au service de toutes les réalités charismatiques du monde, et aucune d’elles n’est prioritaire par rapport aux autres. Dans aucun pays, une communauté, un groupe, une organisation ou un mouvement ne peut prétendre diriger le Renouveau charismatique catholique.
VN – CHARIS est un nouveau service. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’il a de nouveau ?
Jean-Luc Moens – (…) Les Statuts de CHARIS mettent l’accent sur trois dimensions : la diffusion du baptême dans l’Esprit Saint, l’unité des chrétiens, le service des pauvres. Ces dimensions sont au service de l’évangélisation, à laquelle le Saint-Père appelle le Renouveau à participer et à laquelle il est engagé.
La diffusion du baptême dans l’Esprit peut ne pas sembler un fait nouveau. C’est ce que fait le Renouveau charismatique depuis sa naissance. Ce qu’il y a de vraiment nouveau aujourd’hui c’est que le Pape lui-même demande que le baptême dans l’Esprit soit connu dans toute l’Église. Il l’a fait à plusieurs reprises de façon très claire. C’est un nouveau pas pour le Renouveau charismatique, un défi qui doit être relevé au service de l’Église universelle.
Le Pape François exhorte aussi le Renouveau charismatique à revenir à ses racines œcuméniques, c’est-à-dire à œuvrer avec dynamisme à l’unité des chrétiens. C’est quelque chose qui était très présent à la naissance du Renouveau charismatique et qui, en de nombreux endroits, a été progressivement mis de côté. Le Pape nous demande de le remettre au premier plan.
Le service des pauvres n’est pas non plus une nouveauté. Ce qui est nouveau, cependant, c’est d’encourager explicitement les « charismatiques » à servir les pauvres et les nécessiteux. Cela ne doit pas nous surprendre : l’Esprit Saint est amour. Il est donc normal que ceux qui veulent dépendre totalement de Lui soient des témoins de l’amour. C’est pourquoi le service des pauvres est au cœur du Renouveau.
Les trois dimensions que je viens de souligner sont naturellement incluses dans l’appel à l’évangélisation qui est adressé à tout le Renouveau charismatique. Le baptême dans l’Esprit est l’expérience de la Pentecôte qui met les apôtres en mission. La compassion et la charité donnent une force nouvelle à l’évangélisation parce qu’ “à ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres” (Jn 13,35). L’unité des chrétiens fait aussi partie du défi de la mission, parce que Jésus nous y appelle : “Qu’ils soient un afin que le monde croie” (Jn 17,21).
Pour la première fois également, on a une jeune femme de moins de 30 ans dans l’équipe du Service de communion internationale de CHARIS. Elle représente les jeunes du monde entier car les jeunes sont aussi protagonistes du Renouveau charismatique international. Et ils sont une priorité pour CHARIS.
Baptême dans l’Esprit Saint; Unité des chrétiens; service des pauvres.
Ces trois dimensions, comme vous l’imaginez maintenant, affecteront tous les mouvements d’Église, toutes les communautés religieuses, les associations ou organismes ecclésiaux. Elles sont tous appelés à travailler en ce sens, selon le désir du Saint-Père. Par étapes, bien sûr ! En posant d’abord un regard lucide sur notre réalité contemporaine pour mieux discerner et planifier ensuite nos interventions pastorales et évangélisatrices (Voir , Juger, Agir)!
Et puisque nous allons bientôt entamer un grand projet d’évangélisation dans notre diocèse de Pembroke, pourquoi ne pas le commencer en intégrant ces trois réalités dès nos premiers balbutiements ? Allons-nous tous devoir nous conformer et devenir des « charismatiques » selon les bonnes ou fausses interprétations que nous nous faisons du terme, afin de réaliser les désirs du Saint-Père ? À cette question, je réponds par oui et non.
« Oui », parce que nous devons être formés davantage sur les façons d’accueillir la venue de l’Esprit Saint dans notre vie quotidienne. Comment ? En cultivant la charité, la fidélité, la pureté, la prière et l’humilité. Ces vertus doivent former un tout, sans quoi l’Esprit sera absent de nos plus beaux apostolats ou projets. Ces façons d’inviter la venue de l‘Esprit en nos cœurs nous permettront d’accueillir ensuite les divers dons que l’Esprit voudra bien nous communiquer pour bâtir son Église ; pour mieux évangéliser ; pour entrer davantage en communion avec nos frères et sœurs de diverses dénominations chrétiennes ; et enfin pour rejoindre les plus démunis de nos frères et sœurs (au niveaux matériel et/ou spirituel) et de venir en aide concrètement aux plus nécessiteux.
Mais je dis aussi « non », parce qu’il ne s’agit pas de désirer uniquement « recevoir ou posséder des dons » soi-disant « charismatiques » ou encore de chercher à se conformer par obéissance servile au désir du Saint-Père, en apprenant par exemple à répéter mécaniquement ou intellectuellement des formules de prières ou en récitant des actes de foi appris par cœur, ou en posant des actions sans véritable intériorité. L’important n’est pas de dire : « Moi je suis charismatique parce que j’ai tel ou tel don, » mais plutôt de dire : « Moi, je suis baptisé dans l’Esprit Saint, parce que j’entretiens une relation d’amour quotidienne avec Jésus par mes moments de prière et de solitude, et parce que j’essaie de vivre les vertus de charité, de fidélité, de pureté et d’humilité. Toutes ces dispositions me permettent d’accueillir les dons que l’Esprit voudra bien me communiquer afin d’accomplir ma mission de chrétien(ne) ; voilà pourquoi je désire aussi nouer des relations œcuméniques avec mes frères et sœurs chrétiens(nes), sans oublier de m’engager à servir les plus pauvres dans mon milieu. »
Je termine ma réflexion en nous invitant tous à contempler Marie, Mère de Jésus et notre Mère, en tant que modèle de femme baptisée dans l’Esprit Saint. En elle, l’esprit de recueillement était intense ; très intense. Elle savait se recueillir en Dieu même dans ses occupations ordinaires. Et sa grande joie était sans doute de pouvoir s’isoler dans la contemplation, le silence et la solitude, mais jamais au détriment de la charité qui l’amenait souvent, j’imagine, (et comme il nous arrive à chacun de nous) à quitter sa solitude pour faire indulgence ou faire preuve de patience à quiconque pouvait se présenter à elle. Ne doutons pas que la « pleine de grâces » tenait toujours l’amour du prochain comme la plus grande priorité de sa vie spirituelle, au point de quitter sans hésitation ses plus belles méditations lorsqu’une occasion de faire la charité se présentait. « Laisser Dieu pour Dieu », disait une grande spirituelle, à l’exemple de Mère Térésa de Calcutta qui voyait toujours Dieu dans son prochain. Que Marie soit notre modèle d’écoute et d’accueil de l’Esprit Saint dans notre quotidien. Qu’elle nous accorde, par sa puissante intercession, de persévérer et de rester fidèles jusqu’à la fin. Voilà la preuve qui habite le cœur, l’esprit et l’âme de la personne qui est véritablement « baptisée dans l’Esprit Saint. »