Le Canada, terre d’accueil pour les immigrants ukrainiens

Le 8 mars 2022

Le Canada, terre d’accueil pour les immigrants ukrainiens

Chers frères et sœurs,

La guerre qui fait présentement rage en Ukraine est pour nous l’occasion non seulement de prier et d’offrir notre aide multiforme à ce peuple fragilisée et bafoué, mais aussi un moment pour nous rappeler l’histoire de leur arrivée en Canada. À cela, il nous faut inclure les grands bienfaits sociaux qui s’en sont écoulés et qui ont contribué au développement et à l’enrichissement de notre pays aux vastes étendues de terres souvent inhospitalières et sauvages à l’époque.

On compte présentement environ 1,4 million de Canadiens qui ont des racines ukrainiennes. Il s’agit de la deuxième plus grande diaspora après celle en Russie. Les premiers immigrants ukrainiens sont arrivés en 1891.

En l’espace d’une vingtaine d’années, entre 170,000 et 200,000 immigrants ukrainiens entreprennent le grand voyage, attirés qu’ils sont par la promesse du gouvernement fédéral de leur donner 160 acres à cultiver dans l’Ouest canadien, moyennant des frais d’inscription de 10,00 $ ! Tout un cadeau pour ces nouveaux arrivants! Mais le trajet était long et ardu : la traversée de l’Atlantique durait de trois à quatre semaines. Ils devaient ensuite transiter à Montréal et s’embarquer ensuite dans un train jusque dans les Prairies. D’aucuns changeaient d’idée et décidaient de s’établir plutôt à Montréal. Aujourd’hui, nous avons peine à imaginer la longueur de ce fatiguant périple dont la destination était totalement inconnue.

Les immigrants, pour la majorité agriculteurs, quittaient des terres fertiles en Europe de l’Est afin de s’établir en Alberta, au Manitoba et en Saskatchewan, reconnues comme le grenier de blé du Canada. Ils ont été les « défricheurs de l’Ouest », comme l’a précisé la professeure Stella Hryniuk, spécialiste de l’histoire canado-ukrainienne.

Après la Première Guerre mondiale, près de 65 000 immigrés ukrainiens arrivent chez nous. Durant la Seconde Guerre mondiale, ils seront plus de 35 000 Ukrainiens à s’enrôler dans l’armée canadienne. Une autre vague d’immigrants font plus tard leur arrivée en Canada. Ils s’installent en particulier dans les grandes villes d’Ottawa, de Montréal et de Toronto; certains se déplacent jusqu’à Val-d’Or et à Black Lake en 1910, où 500 d’entre eux travaillent dans les mines ou dans les industries. Mais la montée du nationalisme québécois sous René Lévesque jette beaucoup d’incertitude et d’inquiétude, ce qui en amène plusieurs à fuir le Québec. D’autres grands changements politiques au niveau international, notamment la chute de l’Union soviétique et la guerre en Crimée, les poussent à venir s’établir au Canada.

En Abitibi, des centaines d’Ukrainiens viennent s’y établir au tout début de la colonisation, mais une page plus sombre se tourne plus tard lors de la Première Guerre mondiale, où 1000 immigrants sont détenus dans un camp d’internement près d’Amos, parce qu’on les considère comme des ennemis potentiels. Environ 1 200 Canadiens d’origine ukrainienne sont envoyés dans le camp de Spirit Lake entre 1915 et 1917, où ils sont traités comme des prisonniers de guerre. En tout, environ 5 000 Canadiens d’origine ukrainienne provenant de la Galicie sont emprisonnés dans des camps à cette époque. On ferme les écoles de langue ukrainienne et des journaux de langue ukrainienne subissent d’importantes restrictions.

En 1906 à Hochelaga (Montréal), un rédemptoriste belge se voit confié les soins de trois communautés ukrainiennes, mais Winnipeg demeure incontestablement le centre culturel des Ukrainiens et des Polonais des Prairies. Il a fallu attendre en 1902 pour que le Saint Siège de Rome permette à un petit nombre de religieux célibataires de l’ordre ukrainien de Saint-Basile de quitter la Galicie pour émigrer au Canada. Trois ans plus tard, les religieux basiliens n’ont pris en charge que deux paroisses manitobaines.

Depuis leur arrivée en sol canadien jusqu’à la Première Guerre mondiale, les immigrants ukrainiens sont privés d’assistance religieuse, parce que le Vatican interdit l’émigration des prêtres mariés qui constituent presque tout le clergé catholique de rite ukrainien en Europe orientale. En 1912, un prêtre basilien de la Galicie est ordonné évêque pour les catholiques ukrainiens immigrés canadiens et devient ainsi le premier évêque grecque-catholique au Canada. Il s’agit de Mgr Nykyta Budka (maintenant bienheureux) qui arrive au Canada cette même année et s’installe à Winnipeg en décembre 1912. À ce moment, la population ukrainienne au Canada compte plus de 150 000 personnes.

Quelques années avant la création du diocèse ukrainien en 1912 englobant tout le Canada, les immigrants ukrainiens représentent environ la moitié des fidèles à Saint-Boniface au sud du Manitoba; 80% à Prince Albert au centre de la Saskatchewan; 33% à Calgary et 50% à Edmonton.

En 1912, l’évêque basilien réussit finalement à inciter une poignée de prêtres séculiers ainsi que quelques rédemptoristes (qui arrivent au cours de la même année après la formation de la nouvelle vice-province religieuse anglophone du Canada) à adopter le rite byzantin. Ces derniers desservent éventuellement une population de près de 100 000 fidèles.

Au Canada, les immigrants ukrainiens sont surtout reconnus pour leur apport considérable dans le domaine de l’agriculture. Au fil de l’histoire, ils en arrivent à délaisser les terres pour s’établir plutôt dans les grandes villes. En 2016, ils forment près de 9% de la population de l’Alberta, 13% de la Saskatchewan et 15% du Manitoba.

En cette période troublante où la guerre fait présentement tant de ravages en Ukraine, prions et gardons nos cœurs ouverts à l’arrivée de futurs immigrants qui devront, encore une fois, fuir leur pays d’origine à contrecœur. Devenons une terre d’accueil, comme le Christ s’y attend de nous. À l’exemple de nos ancêtres, soyons de nouveau accueillants et pleins de compassion envers ces immigrants! Ils contribueront sans aucun doute encore une fois à notre enrichissement et à notre épanouissement mutuel.

Si vous désirez contribuer personnellement par un don à des programmes d’aide humanitaire en Ukraine, voici quelques liens où vous pourrez faire parvenir vos dons en toute sécurité afin de venir en aide à nos frères et sœurs en détresse:

Sincèrement vôtre dans le Christ Rédempteur,

 

+Guy Desrochers, C.Ss.R.
Évêque de Pembroke


Lire: Déclaration du Bureau de direction de la Conférence des évêques catholiques du Canada sur l’invasion de l’Ukraine par la Russie

Lire: Les évêques catholiques du Canada invitent tous les fidèles canadiens à se joindre au pape François et à prier pour la paix en Ukraine

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