À nos heures, nous vivons tous des moments de grisaille ou de noirceur qui nous empêchent de voir clairement et d’apprécier les bienfaits ou les personnes qui nous entourent.
Je me souviens d’un ami prêtre que j’allais visiter de temps en temps aux États‐Unis lorsque je faisais une tournée de prédication de retraites paroissiales, ou lorsque je faisais une tournée de « Soirées de sainte Anne. » Lors d’une visite, je le trouve déprimé et découragé de la vie, car il venait d’apprendre qu’on allait lui couper quelques orteils au pied gauche, conséquence d la mauvaise circulation sanguine causée e p r son di bète.
J’essayais tant bien que mal de l’encourager par mes paroles et mes recommandations, mais il était tellement préoccupé par l’opération et les conséquences désastreuses de cette amputation partielle, qu’il semblait inconsolable. En partant, je lui dis que je prierais beaucoup pour lui et pour son chirurgien, ainsi que les personnes qui l’aideraient à se remettre sur pied. Durant mon voyage de retour, je ne pouvais m’empêcher de penser comment je réagirais si je devais un jour affronter ce genre d’épreuve. Serais‐je tout abandonné à la volonté de Dieu?
Je pense que notre foi joue un grand rôle dans l’épreuve, et un rôle encore plus grand lorsque la mort approche. Je suis à peu près convaincu que la plupart des chrétiens partagent cette affirmation. Cependant, lorsque je parle de foi, je parle d’une foi qui va puiser régulièrement à la source de l’amour divin par un temps de conversation intime avec Dieu. Une foi qui s’alimente chaque jour et qui, par la force des choses, grandit imperceptiblement jusqu’à devenir un grand arbre où les oiseaux du ciel peuvent venir faire leur nid ou se reposer à l’ombre de ses feuilles. Une foi qui est beaucoup plus que la simple croyance que Dieu existe et qu’il a 1 envoyé son Fils pour donner sa vie pour nous sur la Croix.
Je parle d’une foi agissante et courageuse qui doit rayonner dans le milieu où Dieu nous envoie chaque jour. Une foi profonde et joyeuse qui laisse transparaitre sa conviction en l’amour et la miséricorde infinis de Dieu, au point de devenir un véritable feu qui désire se communiquer à tous. Vous voyez que ce genre de foi dépasse de loin la foi dont on fait mention dans les médias ou lors de nos conversations typiques. Le genre de foi dont je parle ressemble à la foi et la confiance que les jeunes amoureux éprouvent l’un envers l’autre : lorsqu’une épreuve surgit, ils ne se découragent pas, car ils s’appuient l’un sur l’autre et trouvent toujours une façon de s’en sortir en s’encourageant mutuellement. Cette façon habituelle de réagir devant les épreuves est la conséquence de la confiance et de l’amour qu’ils éprouvent l’un pour l’autre.
Mon ami prêtre avait perdu sa joie dans son épreuve. Pendant de longs mois, il semblait glisser dans une grande mélancolie. Et pourtant, il faisait encore ses dévotions, mais son cœur semblait absent lors de son colloque avec Dieu. Et puis un bon matin, quelque temps après son amputation, il arrive à l’hôpital pour de nouveaux examens. En arrivant dans la salle d’attente, un pauvre inconnu le salue avec un grand sourire et le visage rempli de lumière! Il eut un choc en voyant la grande sérénité et la joie qui rayonnait de son visage. Et un plus grand choc encore lorsqu’il s’aperçut que cet homme était dans un fauteuil roulant, avec les deux jambes coupées! Malgré sa condition physique peu enviable, il ne voulait pas être pris en pitié et ne semblait aucunement perturbé par son état de santé. Le simple fait d’être en vie et de pouvoir partager avec ceux et celles qu’il rencontrait chaque jour suffisait pour le rendre heureux.
Ce fut pour mon ami prêtre l’heure de la grâce, l’heure de la visitation de l’archange qui venait lui annoncer une bonne nouvelle. Quelle leçon il reçut ce jour‐là de ce pauvre vieillard dix fois plus mal pris que lui! Ce fut, selon son propre dire, la fin définitive de sa longue dépression et la guérison miraculeuse de son cœur égoïste qui passait beaucoup trop de temps à regarder en arrière, plutôt que de regarder en avant.
En réfléchissant à cette leçon de vie, je rendais grâce à Dieu pour nous avoir prodigué tant de bienfaits depuis notre création; pour le soutien qu’il nous accorde dans les moments d’épreuves et de tentations; pour les amis(es) qu’il met sur nos chemins pour nous décentrer de nous‐mêmes, comme ce parfait inconnu amputé de ses deux jambes, mais dont le sourire radieux était l’expression de la grande joie et de la paix spirituelles qui l’habitaient.
Que Dieu nous donne de croire qu’avec sa grâce, il y aura toujours de la lumière au bout du tunnel!