ARTICLE – Ceux qui comprennent le Cœur de Jésus se font évangélisateurs

« Le cœur de Jésus souffre pour les âmes perdues — pour chaque être humain errant dans les ténèbres, inconscient de Son amour. C’est un cœur qui cherche, qui poursuit, qui ne renonce jamais, embrasé de miséricorde, consumé du désir de ramener chacun dans les bras du Père. »

Approcher le mystère de l’évangélisation dans sa profondeur véritable, c’est s’approcher du Cœur de Jésus. L’évangélisation n’est pas d’abord un programme, une méthode ou une obligation ; elle est réponse à un cri d’Amour — un Amour blessé, brûlant, habité d’un désir ardent de voir revenir chaque enfant éloigné. Sans communion intime avec ce Cœur transpercé, l’évangélisation devient un devoir au lieu d’être une mission d’amour. Seuls ceux qui ont rencontré le Cœur transpercé du Pasteur peuvent parler de Lui avec vérité, et conduire d’autres à son étreinte.

Le Cœur de Jésus dans l’Écriture

Les Évangiles nous révèlent un Jésus « saisi de compassion » (cf. Mt 9,36 ; Mc 6,34 ; Lc 7,13). Le terme grec employé — splagchnizomai — exprime une émotion viscérale, bouleversante. Quand Jésus voit la foule, épuisée et abattue « comme des brebis sans berger », Il n’est pas indifférent. Son cœur est ému jusqu’aux entrailles. Il pleure sur Jérusalem (Lc 19,41-44), s’attriste de l’endurcissement des cœurs (Mc 3,5), et raconte un Père qui court à la rencontre de son fils prodigue (Lc 15,20). Il ne s’agit pas d’un amour lointain, désincarné : c’est un amour qui ressent, qui souffre, qui saigne.

Sur la Croix, c’est le cœur même de Jésus qui est transpercé (Jn 19,34), et de cette plaie jaillissent le sang et l’eau — signes de la naissance de l’Église, sacrements de la miséricorde. Le pape Benoît XVI écrit dans Deus Caritas Est : « Le côté ouvert du Christ est devenu la source d’où jaillit toute la vie de l’Église » (§25). C’est au pied de la Croix, en présence de ce Cœur ouvert, que naît l’évangélisation.

Le Magistère : l’évangélisation, œuvre de l’amour

Le Concile Vatican II enseigne que « l’Église, envoyée par Dieu aux nations pour être le sacrement universel du salut, s’efforce, mue par les exigences intérieures de sa propre catholicité et obéissante au commandement de son fondateur, de prêcher l’Évangile à tous les hommes » (Ad Gentes, §1). La mission évangélisatrice ne découle pas d’une obligation extérieure, mais jaillit de l’amour débordant du Christ révélé au monde.

Saint Paul VI l’affirme clairement dans Evangelii Nuntiandi : « Évangéliser est en effet la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus profonde » (§14). Et il insiste : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins » (§41). Or, qu’est-ce qui rend un témoin crédible ? Un cœur configuré au Christ.

Saint Jean-Paul II approfondit cette réalité dans Redemptoris Missio, en affirmant que l’activité missionnaire est « le devoir le plus sublime et le plus sacré de l’Église » (§63). Il revient sans cesse à la charité comme force motrice de la mission. Le missionnaire est d’abord quelqu’un qui s’est laissé évangéliser par l’amour brûlant du Christ. Sans ce feu intérieur, les paroles deviennent creuses et le témoignage s’affaiblit.

Le pape François, dans Evangelii Gaudium, appelle chaque baptisé à devenir un « disciple missionnaire », animé non par la crainte ou la pression, mais par la joie et l’amour : « Quand l’Église appelle à l’engagement évangélisateur, elle ne fait que montrer aux chrétiens le vrai dynamisme de leur accomplissement personnel » (§10). L’évangélisateur n’est pas un simple exécutant : il est l’ami de l’Époux, celui qui a entendu battre le Cœur de Jésus, et qui ne peut plus garder le silence.

Comprendre la blessure du Christ

Comprendre la blessure du Cœur de Jésus, c’est regarder le monde avec ses yeux — non comme un champ de bataille idéologique, mais comme un enclos de brebis perdues. Cette blessure n’est pas de la frustration, mais de l’amour ; non une condamnation, mais un profond désir. Il souffre parce qu’Il aime. Il cherche parce qu’Il se soucie. Sa mission reste celle-ci : « chercher et sauver ce qui était perdu » (Lc 19,10). Ceux qui sont les plus éloignés, les plus enfouis dans l’ombre, ceux qui se croient indignes — ce sont eux que Son Cœur désire le plus.

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Docteur de l’Église, l’exprimait ainsi : « Jésus n’a pas besoin de nos œuvres, mais seulement de notre amour. » Son zèle missionnaire — bien qu’elle n’ait jamais quitté son carmel — jaillissait de son union intime avec le Cœur de Jésus. Dans son amour et sa prière pour les pécheurs, elle a montré que la véritable évangélisation commence dans l’union, et non dans l’action.

Devenir évangélisateur selon Son Cœur

Évangéliser, ce n’est pas d’abord parler, mais aimer. C’est s’asseoir aux pieds du Maître, écouter les battements de Son Cœur, pleurer avec Lui sur les âmes perdues. Alors seulement, nos paroles auront le parfum du ciel. Les saints, ces grands évangélisateurs de l’histoire, n’étaient ni stratèges chevronnés ni orateurs brillants. Ils étaient des hommes et des femmes embrasés du feu même qui consumait le Cœur du Christ.

Dans la prière, dans l’adoration, dans les sacrements — en particulier l’Eucharistie et la Réconciliation — nous rencontrons encore et toujours ce Cœur vivant. Là, nous découvrons ce que Dieu désire profondément : « que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2,4). Tout, dans l’Église, est ordonné à ce but : la théologie, la liturgie, la vie communautaire — tout est au service du salut des âmes.

Conclusion

Ceux qui comprennent le Cœur de Jésus deviennent évangélisateurs, car ils portent son fardeau, prononcent ses paroles et reflètent sa miséricorde. Le monde n’a pas besoin de plus de discours ; il a besoin d’amour. Un amour qui saigne, qui pardonne, qui persévère. Voilà l’amour du Sacré-Cœur. Voilà la source de la mission de l’Église. Voilà ce que Dieu désire : que Son Fils soit connu, aimé et suivi par chaque cœur sur la terre.

Pierre-Alain Giffard, Directeur de la pastorale diocesaine
Courriel: pierre.alain.giffard@gmail.com

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