ARTICLE – Renouveau de la vie paroissiale : la vision de l’Archidiocèse de Philadelphie

Les bureaux de la Nouvelle Évangélisation et de la Planification Stratégique de l’Archidiocèse de Philadelphie ont récemment dévoilé leur vision pour le renouveau paroissial. Présentée sous le titre évocateur La Vie paroissiale en temps apostolique, cette vision s’articule autour de la figure du « disciple missionnaire ».

Le « disciple missionnaire » s’enracine dans l’appel de Jésus en Marc 1,17 : « Suivez-moi, et je ferai de vous des pêcheurs d’hommes. » L’on y discerne à la fois l’aspect du « disciple », celui qui suit le Christ, et celui du « missionnaire », appelé à annoncer l’Évangile.

La présentation s’appuie notamment sur le modèle du « losange spirituel » développé par The Evangelical Catholic, qui décrit les différentes étapes de la croissance spirituelle :

  • Pré-évangélisation : instaurer des relations de confiance, tisser des liens humains profonds.

  • Proclamation missionnaire (kérygme) : annoncer la Bonne Nouvelle et inviter à une réponse personnelle à Jésus, ce qui conduit à la naissance des « croyants ».

  • Catéchèse initiatique : accompagner les premiers pas dans la vie de disciple, aidant les croyants à devenir des « disciples ». Il s’agit ici de la phase de consolidation (Build).

  • Catéchèse perfective : approfondir la plénitude de la foi et de la vie morale, pour faire mûrir les disciples en « disciples missionnaires ». C’est une dimension de l’étape de formation (Equip).

  • Formation pour la mission : cultiver l’intelligence missionnaire, les compétences et les habitudes nécessaires à l’évangélisation.

  • Envoi des disciples missionnaires : la phase ultime (Send), où les disciples sont envoyés pour « gagner, construire, équiper et envoyer » d’autres disciples.

Cette présentation établit un contraste saisissant entre le modèle de la « chrétienté » et celui de l’« âge apostolique » dans lequel nous sommes désormais entrés. Dans un monde de chrétienté, la culture était chrétienne et les personnes étaient naturellement conduites à la paroisse, qui les accueillait. Aujourd’hui, dans un contexte apostolique, la culture ambiante est souvent séculière et pousse les personnes loin de la paroisse. Dès lors, c’est à la paroisse d’aller activement à la rencontre du monde et de faire découvrir le Christ. Le défi réside dans le fait que la réalité apostolique d’aujourd’hui se heurte fréquemment à une mentalité de chrétienté restée figée.

Pour impulser un changement de culture paroissiale vers cet esprit missionnaire, plusieurs ressources et programmes sont proposés, tels que la Genesis Mission, ReachMore de l’Evangelical Catholic, Sharing Christ de ChristLife, ou encore Foundations for Discipleship de FOCUS. Ces outils accompagnent les différentes étapes du parcours : la pré-évangélisation (ex. : retraites kérygmatiques Ablaze), la proclamation missionnaire (ex. : Discovering Christ), la catéchèse initiatique (ex. : études bibliques FOCUS), et la formation des disciples (ex. : Écoles de disciples missionnaires).

La présentation illustre concrètement la différence entre une pastorale d’entretien (modèle de chrétienté) et une pastorale de mission (modèle apostolique), dans des situations paroissiales courantes :

  • Rencontres avec les parents dans le cadre de la préparation sacramentelle : plutôt que de simplement faire signer une feuille de présence avant de transmettre quelques informations logistiques, une approche missionnaire commence par un accueil chaleureux par les catéchètes, un temps de convivialité, une Lectio Divina sur l’amour du Christ, puis une intervention favorisant la relation personnelle avec Dieu — les aspects pratiques venant ensuite.

  • Programme paroissial de la CYO (Catholic Youth Organization) : là où une équipe de basket pourrait n’avoir pour seul lien avec la foi qu’un Je vous salue Marie récité avant le match, sans participation dominicale des familles, une approche missionnaire chercherait à intégrer la foi dans l’ensemble de l’expérience.

  • Baptêmes paroissiaux : au lieu d’informer les couples non inscrits qu’ils doivent d’abord s’enregistrer avant de fixer une date, puis de ne plus revoir la famille après le baptême, une approche missionnaire met l’accent sur l’accueil, la construction d’un lien et l’accompagnement dans la durée.

Une stratégie centrale mise en avant est celle des « pôles missionnaires ». Il s’agit de centres paroissiaux dynamiques d’évangélisation, où des disciples missionnaires accompagnent les personnes en marge de l’Église ou peu desservies. Ces pôles offrent des lieux de rencontre avec le Christ, de croissance dans la foi et de lancement en mission, tout en enrichissant la vie ecclésiale locale.

L’objectif est d’établir au moins dix de ces pôles par comté (soit une cinquantaine) au cours de la prochaine décennie, implantés dans des paroisses ou dans d’autres lieux. Leur mission est d’atteindre les catholiques non pratiquants, les personnes éloignées de l’Église, de susciter un esprit de disciple missionnaire, de créer un réseau d’évangélisation à l’échelle de l’archidiocèse, et d’insuffler une nouvelle vitalité, notamment dans les zones négligées.

Ces pôles ne visent pas à remplacer les structures paroissiales existantes, mais à les faire croître. Des équipes formées à la mission y seront intégrées, ayant pour mandat exclusif l’évangélisation. Elles viseront les « 83 % » (probablement les non-pratiquants), tout en soutenant les « 17 % » (les pratiquants réguliers), et en déployant leur action au-delà des limites paroissiales. Les paroisses continueront d’assurer leurs ministères habituels.

La « vie de pôle » se veut un lieu de rencontre avec Jésus (à travers l’Eucharistie, la confession, les œuvres de miséricorde, l’enseignement, les petits groupes, l’accompagnement pastoral, les retraites, la direction spirituelle), d’accueil dans l’Église (pour les sacrements, les chercheurs de sens, les nouveaux arrivants ou les personnes en transition de vie), et de départ en mission (discernement des vocations, service des pauvres, formation de disciples missionnaires). Pour soutenir cette dynamique, l’équipe paroissiale actuelle (souvent composée de 3 à 5 membres plus le clergé) pourrait être renforcée par un directeur du pôle missionnaire, deux missionnaires à temps plein, un responsable des communications et un coordinateur des services et du bénévolat.

Face à la diminution du nombre de prêtres, il est rappelé que l’appel à être disciple missionnaire s’adresse à tous les baptisés. On espère que cet élan missionnaire favorisera aussi les vocations. Dans les situations où le nombre de prêtres ne suffit plus, la vie paroissiale pourrait être confiée à des directeurs de communauté (diacres, religieux, religieuses ou laïcs), sous l’autorité de l’évêque, les prêtres retraités se consacrant alors exclusivement à la célébration des sacrements.

Concernant la relation entre les paroisses sans pôle et celles qui en hébergent un, c’est au curé de chaque paroisse qu’il revient de discerner les modalités de cette collaboration. Les programmes pastoraux continueront dans les paroisses, avec cependant une exigence renouvelée : en temps apostoliques, la médiocrité n’est plus une option. Toute initiative doit viser l’excellence pour porter du fruit. Les curés sont invités à dialoguer avec leurs équipes pour discerner comment tirer parti des ressources des pôles missionnaires au service de leur propre communauté. Les paroisses sans pôle sont aussi encouragées à s’inspirer des stratégies proposées pour renouveler leur culture paroissiale.

La présentation s’achève par une liste d’ateliers et de formations à venir, tels que l’atelier Genesis Mission et les parcours Allez, faites des disciples.

Pierre-Alain Giffard
pierre.alain.giffard@gmail.com

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